jeudi 27 octobre 2011

L’accord européen : gagner du temps

Voici les principaux éléments de l’accord négocié cette nuit à Bruxelles :
- la Grèce : on efface 100 milliards d’euros (les banques abandonnent 50% de leurs créances)… et on prête 100 milliards d’ici 2014 (aide de l’UE qui remplace celle décidée lors du plan du 21 juillet). C’est du bonneteau ! D’ici là on espère que la Grèce va se redresser, bien sûr.
- les banques se recapitalisent de 100 milliards d’euros, en faisant appel au marché. Déjà le montant est jugé insuffisant par beaucoup (le FMI parle de 200). Mais surtout, quand on regarde le détail par pays, on se demande comment les banques grecques vont lever 30 milliards d’euros sur les marchés ! Ou les banques espagnoles 26 milliards, ou portugaises 7,8 milliards ! Voici d’autres plans d’aide en perspective…
- un FESF à effet de levier : ce que nous redoutions se met en place. Un FESF au rabais, déjà atteint par la crise (« Ce Fonds disposait à sa création de 440 milliards d'euros mais après avoir été mis à contribution pour aider le Portugal et l'Irlande, et en raison d'un complexe montage financier pour lui octroyer une note AAA, il ne dispose plus aujourd'hui que d'une capacité effective estimée à 250 milliards d'euros. » Les Echos) va passer à 1000 milliards ! L'effet de levier sera obtenu via un double mécanisme : 1) il s'agira d'une part d'assurer partiellement les dettes souveraines émises par des pays en difficulté et, 2) d'autre part, de créer une nouvelle entité adossée au FESF et au FMI et auquel participeront des investisseurs internationaux, comme la Chine ou d'autres grands pays émergents (l’Europe quémande de l’argent à la Chine, quelle honte !) L’Allemagne et la France seront les principaux garants de ce FESF. Notre dette publique de 1600 milliards d’euros ce n’était pas assez, on se remet au-dessus de nos têtes une nouvelle épée de Damoclès.
- la BCE va continuer à monétiser (acheter de la dette souveraine sur le marché secondaire), son nouveau président, Mario Draghi, s’y est engagé. L’ancien directeur de Goldman Sachs fait preuve de la docilité que chacun attend de lui (bientôt on regrettera Jean-Claude Trichet !).

On le comprend, cet accord ne sert qu’à gagner du temps, et lorsqu’un autre pays européen connaîtra des difficultés (Portugal, Espagne, Italie), un autre plan sera nécessaire. Surtout l’édifice est fragile : le FESF bénéficie du triple A et peut donc emprunter bon marché parce qu’il est garanti par l’Allemagne et la France. Si Paris perd son AAA, le Fonds le perdra également et tout sera remis en cause. Pas grave, on fera un autre plan.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mercredi 26 octobre 2011

Goodwills, l’autre bombe financière

Goodwills, l’autre bombe financière, mon nouvel article sur Atlantico. Et l’article des Echos cité en lien, dans le 4e paragraphe. Quasiment la moitié des actifs des sociétés du CAC 40 est BIDON. J’avais déjà pointé ce problème dans mon livre Finance : le nouveau paradigme (page 186).

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mardi 25 octobre 2011

Groupama, futur Dexia ?

Révolution de palais à Groupama, Jean Azéma a été révoqué par le Conseil d'administration, il est remplacé par Thierry Martel. La situation semble grave : « Pris dans la crise des dettes souveraines, plombé par ses fortes expositions à des titres malmenés en Bourse depuis cet été (Société Générale, Veolia Environnement), l'assureur alimente des interrogations sur sa marge de solvabilité », soulignent Les Echos (cité par Le Figaro). La note du groupe avait déjà été dégradée par S&P à BBB, pas très loin de la catégorie dite spéculative, une note parmi les plus mauvaises des grands groupes européens dans son secteur. On retrouve beaucoup de points communs avec Dexia (cf cet article de L’Expansion) : expansion agressive à l’étranger, prise de risque (sur le marché action et la dette souveraine), gouvernance bancale (actionnariat privé et mutualiste), problème de financement (Groupama comptait s’introduire en bourse…). L’ampleur des créances toxiques semble moindre mais le mal est identique à Dexia (ou au Crédit Lyonnais). Le groupe pourra-t-il s’en sortir tout seul ou devra-t-il faire appel à l’Etat ? Réponse dans les prochains jours.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

vendredi 21 octobre 2011

AAA, l’urgence

Après Moody’s, c’est au tout de Standard & Poor’s de s’interroger sur le triple A de la France, l'agence de notation avertit d'une probable dégradation des notes des dettes souveraines de la France, de l'Espagne, de l'Italie, de l'Irlande et du Portugal en fonction de la conjoncture économique. «L'envolée des déficits publics et la recapitalisation des banques va peser lourdement sur l'endettement des pays de la zone euro» note S&P. Clairement, la dégradation est en ligne de mire, que l’on peut raisonnablement estimer dans 3 ou 6 mois.

Que fait le gouvernement pendant ce temps-là ? Il s’interroge pour savoir si les boissons énergétiques subiront la future taxe sur les boissons sucrées. Que fait la France au niveau européen ? Elle demande un FESF à 2000 milliards d’euros (une pure folie, voir cette note), au risque de bloquer tout solution à la crise.

Il serait peut être temps de s’attaquer aux vrais problèmes (baisse des dépenses publiques, compétitivité). Et aussi de frapper fort dans le dossier Dexia en confiant le dossier à la justice car, désormais on le sait, des malversations se sont produites : sous-estimation des risques (des cabinets d’audit sont impliqués), et deux formes de cavalerie financière : 1) des prêts fournis à ses propres actionnaires pour acheter ses titres, 2) la banque qui accepte en collatéral sur ses prêts ses propres actions, ce qui implique que tout effondrement du cours de l'action provoque de lourdes pertes. Les sanctions doivent tomber, ne serait-ce que pour diminuer le sentiment d’impunité des autres banques.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mardi 18 octobre 2011

Moody’s s’interroge sur le triple A de la France

Moody’s envisage de revoir la perspective « stable » de la note française, « au cours des trois prochains mois, Moody's va surveiller et évaluer cette perspective stable, au regard des progrès effectués par le gouvernement pour mettre en œuvre » les mesures annoncées de réduction du déficit budgétaire, selon son communiqué. L’agence pointe deux motifs d’inquiétude, 1) « la nécessite d'apporter un soutien additionnel à d'autres pays européens », c'est-à-dire le FESF, dont nous avons dénoncé les dangers dans notre précédent billet, et 2) et un soutien additionnel à « son propre système bancaire ». Effectivement, l’Assemblée vient de voter 33 milliards de garantie pour Dexia, et d’autres banques risquent d’être concernées. Ce communiqué de Moody’s fait écho à celui de Standard & Poor’s la semaine dernière qui a dégradé le « Bicra » (Banking Industry Country Risk Assessment) de la France de groupe 1 à groupe 2, ce qui veut dire que le secteur bancaire français devient plus « risqué »… Soyons clairs : désormais le compte à rebours pour la perte du triple A de la France vient de commencer.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

jeudi 13 octobre 2011

FESF = Ponzi


L’idée est folle mais elle fait son chemin, le FESF serait porté à 2500 milliards d’euros par effet de levier, à partir d’une base en «cash» de 440 milliards. Déjà d’où viennent ces 440 milliards ? Ils sont levés par le Fonds d’aide européen grâce à une garantie des Etats. Des Etats eux-mêmes en déficit rappelons-le ! Ensuite ces 440 milliards seront «investis» dans des obligations d’Etats en difficulté (Grèce, Portugal, Irlande), ou dans des banques en difficulté, c'est-à-dire des actifs pourris, qui perdront de la valeur à vitesse grand V. Mais si l’Espagne et l’Italie voient les marchés se fermer à leurs emprunts (et ce problème commence à venir), les 440 milliards ne suffiront pas. D’où l’idée de permettre au FESF de s’endetter encore plus, jusqu’à 2500 milliards d’euros, c'est-à-dire 2500 milliards d’actifs pourris. Cela veut dire que les pays encore solvables (Allemagne, France, Europe centrale et du Nord) seront garant de cette somme ! Et au fait, qui va acheter les emprunts émis par le FESF ? Les banques européennes bien sûr. Le système tourne en rond, il ne s’agit rien de moins que d’une immense pyramide de Ponzi, où chacun prête ce qu’il n’a pas (merci à Zero Hedge pour la photo). Et quand le FESF rempli d’actifs toxiques enregistrera des pertes gigantesques, que fera-t-on ? On créera un autre fonds pour aider le FESF ? L’Europe est en train de construire un énorme subprime au-dessus de sa tête, qui mènera toutes les banques et tous les Etats à la faillite lorsqu’il s’écroulera.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

lundi 10 octobre 2011

Histoire belge

On les a bien eus les Belges ! Alors que la déconfiture de Dexia a été provoquée par le Français Pierre Richard, qui a dirigé le groupe de 1987 à 2008 (folie des grandeurs, effet de levier démesuré, expansion aux USA, etc.), et sans que les autorités de tutelle françaises ne s’inquiètent (c'est-à-dire ne fassent leur travail), la France limite sacrément les dégâts. En effet, la « Bad Bank » (plus de 100 milliards d’actifs toxiques) sera garantie par la Belgique à hauteur de 60,5%, et seulement 36,5% par la France, et 3% par le Luxembourg ! Trop fort. Voici une nouvelle histoire belge à rajouter dans toutes les anthologies du genre. Résultat, les agences de notation confirment le AAA français, alors qu’elles vont certainement dégrader la Belgique. Un grand bravo aux négociateurs français ; s’ils pouvaient faire preuve d’autant de maestria pour réduire le déficit budgétaire, ce serait parfait.

Philippe Herlin
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mercredi 5 octobre 2011

Dexia, un nouveau Crédit Lyonnais en pire !

Mon nouveau texte sur Atlantico : Dexia, un nouveau Crédit Lyonnais en pire !

Autrement j'ai évoqué le cas Dexia ce matin sur Radio Classique (7h45) et RMC et hier sur France Culture au journal de 8h.
Je suis interviewé dans la nouvelle émission hebdomadaire de François Pécheux sur France 4, Une semaine d'enfer, ce soir à 22h30. (en podcast à partir de 55'20'')

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr