jeudi 23 juin 2011

Roll-over, la fuite en avant

Les relations incestueuses entre les Etats et les banques (que nous avions dénoncées dans cette note) franchissent un nouveau seuil puisque les grands pays européens veulent obliger les banques et les sociétés d’assurance à faire du « roll-over » sur la dette grecque. Le roll-over consiste, pour les créanciers privés, à racheter un montant d'obligations grecques équivalent à celui qui arrive à échéance, afin de ne pas augmenter le besoin de financement de la Grèce. Autrement dit, lorsqu’un emprunt obligataire grec arrive à échéance, la banque ne pourra pas pousser un ouf de soulagement et investir cet argent dans des activités moins risquées, elle devra réinvestir cette somme dans de nouveaux emprunts grecs ! Tout ceci sur la base du « volontariat » bien sûr, mais les banques françaises sont convoquées à Bercy et on leur fait comprendre que tout le monde est sur le même bateau. L’Etat entrave le libre jeu du marché et accroît le risque systémique, le roll-over n’est rien d’autre qu’une modalité supplémentaire de la pyramide de Ponzi des dettes européennes.

Dans le même temps, Paris s’active pour faire mettre dehors Bini Smaghi du directoire de la Banque centrale européenne. Avec la prochaine nomination de Mario Draghi à la tête de la BCE en remplacement de Jean-Claude Trichet, les italiens auront deux postes et la France aucun, un scandale, un affront, etc. Le problème c’est que Bini Smaghi est le plus lucide et le plus critique des membres du directoire sur les dangers de l'endettement public et des relations endogamiques entre les banques et les Etats (voir cette note) et s’avère très rigoureux sur l’indépendance de la BCE. Une vraie bonne raison de le mettre à la porte. Mario Draghi, qui a travaillé de 2002 à 2005 à Goldman Sachs (la banque qui a aidé la Grèce à maquiller ses comptes publics) sera, soyons-en sûrs, plus « souple ».

Autrement, USA, reprise ou cataclysme ?, mon interview dans Le Bulletin d’Amérique

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr