lundi 30 mai 2011

Grèce : l’Eurosystème en danger ?

L’Eurosystème cékoidon ? On en a parlé ici, c’est la structure qui réunit la Banque centrale européenne (BCE) et les banques centrales nationales. La BCE est la banque centrale mais pas unique de l'Europe, chaque pays a voulu garder sa banque centrale, qui possède donc une certaine autonomie, par exemple (au hasard), pour acheter de la dette grecque de façon à délester ses propres banques nationales de ces produits risqués. Voici un système bancal : pourquoi cette autonomie et pour quelles responsabilités ? Les règles sont-elles les mêmes pour toutes les banques centrales nationales ? Il n’y a donc pas que la BCE qui a un bilan dégradé, mais également les différentes banques centrales d'Europe. Selon un gérant de Pimco Europe (un des plus gros fonds d’investissement du monde), l’Eurosystème serait exposé à la dette grecque à hauteur de 135 milliards d’euros ! C’est plus que ses fonds propres (capital et réserves : 81 milliards d’euros), ce qui veut dire qu’un défaut de la Grèce met par terre l’Eurosystème ! D’où la panique qui s’accroît - encore - concernant la Grèce, et l’UE lui demande maintenant de privatiser tout ce qu’elle peut en catastrophe. Encore une illusion, il y a peu d’actifs de grande valeur et le plus important (le port du Pirée) a déjà été vendu aux Chinois. Et pendant ce temps, l’Irlande rentre dans le même scénario que la Grèce en demandant une rallonge…

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

samedi 21 mai 2011

Espagne, Italie… le krach obligataire approche

Alors que le cas de la Grèce est encore loin d’être réglé, et que sa dette est désormais considérée comme spéculative par l’agence de notation Fitch, voici que l’Espagne et l’Italie pointent leur nez. La première fait face à des manifestations monstres essentiellement portée par les jeunes, dont la moitié est au chômage, tandis que la seconde voit la note de sa dette placée sous surveillance négative par S&P, prélude à une dégradation. Quand on voit que l’Union européenne n’arrive pas à se dépêtrer de la Grèce, on imagine la panique si l’Espagne et l’Italie sont à leur tour affectés par la crise de la dette souveraine ! Le dollar ne va pas mieux et, depuis quelque temps, les marchés dérapent, la situation générale s’aggrave (lire cette analyse de Pierre Leconte).

Les grands artistes ont toujours un regard d’avance, comment pourrait-on visuellement et physiquement se représenter la dette souveraine mondiale qui menace de nous engloutir ? Pour désigner l’Etat, le penseur libéral Hobbes avait utilisé la métaphore du Léviathan, ce monstre marin colossal évoqué par la Bible. Leviathan, c’est aussi le nom de l’œuvre fascinante du plasticien Anish Kapoor au Grand Palais, sorte de gigantesque bulle protéiforme envahissant la fragile et complexe nef du Grand Palais (métaphore de la société ?) et menaçant, si elle grandit encore, de la faire exploser. A voir, absolument (des photos et le site de l’expo).

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

jeudi 19 mai 2011

La BCE, une banque comme les autres

Le débat sur la restructuration de la dette grecque divise les pays européens. La France, notamment, est opposée à une restructuration trop sévère du fait que son système bancaire s’avère très engagé en Grèce (voir cette note), pas seulement les banques d’ailleurs mais aussi ses sociétés d’assurance comme Groupama, qui serait menacé de faillite dans ce cas. Mais il y a aussi un acteur qui s’oppose clairement à la restructuration : la Banque centrale européenne (BCE). On a envie de lui dire « de quoi je me mêle ! ». Une banque centrale sert à gérer la politique monétaire (par le taux d’intérêt et la création monétaire) et à superviser le système financier, pas à intervenir dans un conflit entre un débiteur et ses créanciers. Seulement voilà, la BCE a acheté de grandes quantités d’emprunt grecs (et irlandais, portugais) pour soulager les banques et aider le pays à placer son papier ; elle refinance également, pour des montants se chiffrant en dizaines de milliards d’euros, les banques irlandaises (et aussi dans une moindre mesure portugaises et grecques) qui n’ont plus accès au marché interbancaires, les autres banques n’ayant plus confiance. A force de trop vouloir intervenir, de se rendre absolument nécessaire, plutôt que de laisser la responsabilité des systèmes bancaires aux Etats, la BCE est descendu de son piédestal et est devenue une banque comme les autres, c'est-à-dire avec un bilan pourri. La BCE a eu les yeux plus gros que le ventre, et une restructuration significative de la dette de la Grèce (sans parler de l’Irlande et du Portugal qui attendent leur tour) entraînerait des pertes supérieures à ses capitaux propres ! La banque centrale ne ferait pas faillite, ce n’est pas concevable, mais elle devrait solliciter les Etats pour la renflouer… Il paraît, c’est même écrit dans la constitution européenne, que la BCE est « indépendante », mais là elle s’est clairement mise dans la nasse.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

lundi 16 mai 2011

Les Etats-Unis sur le point de faire faillite ?

Les Etats-Unis sur le point de faire faillite ? mon nouveau texte pour Atlantico.

Pour prolonger le billet précédent, on lira cet article du Figaro.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

vendredi 13 mai 2011

Grèce : le Parthénon racheté par Disneyland ?

Le FMI a le sens de l’humour, il juge la dette de la Grèce « soutenable ». L’économie grecque génère suffisamment de croissance et de recettes fiscales pour faire face aux échéances de sa dette publique ? Non, il ne s’agit pas de cela, la Grèce peut vendre des actifs. Des entreprises publiques et des banques ? Pas vraiment, de ce coté là il n’y a pas grand-chose. L’Etat, nous dit le FMI, peut vendre des équipements publics (stades), et aussi « des terres, des îles ou des plages ». L’église orthodoxe également, puisque non séparée de l’Etat. En fait la Grèce peut se vendre, tout simplement. Dépêchez-vous d’allez y passer vos vacances, les plages vont devenir payantes ! Le Parthénon sera-t-il racheté par Disneyland ? Bon d’accord les Grecs ont exagéré, la fraude fiscale est généralisée, personne ne sait où sont passés les dizaines de milliards d’euros de fonds structurels versés par l’Europe, les comptes publics ont été trafiqués, etc. Est-ce une raison pour dépecer le pays comme une entreprise en faillite ? On touche ici aux limites de la souveraineté d’une nation vis-à-vis de ses créanciers, qui veulent absolument éviter une restructuration et les pertes qui vont avec. On voit surtout, selon nous, comment un pouvoir politique incompétent et irresponsable, depuis de nombreuses années, dilapide les richesses d’un pays pour conduire la population à la ruine.

Autrement, pour information, je m’occupe du site Classical Music Mobile, dont une nouvelle version vient d'être mise en ligne, et qui propose des enregistrements MP3 de musique classique en « low cost » (1 euro seulement pour un opéra ou une symphonie, paiement par Paypal). Si vous souhaitez soutenir ce blog, faites vous plaisir en commandant des enregistrements sur ce site ! Merci à vous !

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mardi 3 mai 2011

Dette US : le compte à rebours

Il n’y a pas qu’en Europe qu’un compte à rebours s’est déclenché (voir notre billet précédent) avec l’inévitable restructuration de la dette grecque, en attendant celles de l’Irlande et du Portugal, il y a aussi aux Etats-Unis. Le secrétaire au Trésor (équivalent du ministre des finances), Timothy Geithner, a averti les principaux responsables politiques que la limite maximale de la dette publique soumise à l'autorisation du Congrès (14.294 milliards de dollars) serait atteinte le 16 mai et qu'il pourrait continuer d'assumer les obligations de l'Etat, moyennant un certain nombre de mesures exceptionnelles jusqu'au 8 juillet. Après c’est le défaut de paiement, qui aurait des conséquences « catastrophiques » et causerait « une crise financière potentiellement plus grave » que celle de 2008. Les Etats-Unis en défaut sur leur dette publique ! Cela peut arriver, même si l’on peut prévoir que Démocrates et Républicains s’entendront pour éviter le pire.

Il y a également un autre compte à rebours : le Quantitative easing de la Fed. Actuellement la banque centrale achète 100 milliards de dollars par mois d’obligations du Trésor (de la pure création monétaire !), mais ce programme (le 2e du nom) s’arrête en juin. Les 1480 milliards de déficit budgétaire pour 2011 sont en grande partie financés par la Fed. Qui se substituera à elle si le QE 2 s’arrête ? Il faudrait proposer des taux d’intérêts plus élevés pour attirer les investisseurs, ce qui aurait un effet dépressif sur une « croissance » très fragile… Il y aura certainement un QE 3, mais qui ne réglera rien sur le fond.

Par ailleurs, nous avons souvent cité les articles de Vincent Bénard sur le Foreclosure Gate, il publie un livre sur cette affaire tentaculaire, c’est bien sûr une référence.

Philippe Herlin