jeudi 30 septembre 2010

L’Espagne et l’Irlande en difficulté

Deux nouvelles inquiétantes sont tombées ce matin qui confirment que les problèmes de dette souveraine en Europe restent importants. Moody’s a fait perdre son AAA à l’Espagne (les deux autres agences avaient déjà fait de même), et l’Irlande a annoncé que le sauvetage de l'Anglo-Irish Bank coûtera plus cher que prévu. Moody’s reproche à l’Espagne la faiblesse de sa croissance et la lenteur de son ajustement budgétaire, tandis que l’Irlande est confrontée à des créances bancaires toxiques. Mais n’est-ce pas là un simple effet de loupe sur les deux maux que l’on trouve en fait dans l’ensemble des pays européens et aux Etats-Unis, à des niveaux variables certes ? Après la Grèce, le Portugal, la Hongrie, la défiance s’installe dans les pays européens « périphériques », il ne faudrait pas qu’un « grand » pays (Royaume-Uni, Allemagne, France, Italie) soit touché…

Moody's dégrade la note de la dette espagnole, Le Figaro

L'Irlande menacée par le gouffre de l'Anglo-Irish Bank, La Tribune

Philippe Herlin
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mardi 28 septembre 2010

La dette sociale non merci !

Enfin les députés se rebiffent ! La CADES (l’organisme qui gère la dette de la Sécurité sociale) doit s’éteindre en 2021, la CRDS – qui la finance – ayant à cette date totalement remboursé la dette. Ceci n’est déjà qu’une prévision optimiste sur le papier, mais le gouvernement, anticipant certainement que ce sera impossible, veut rallonger la durée de vie de cette caisse de quatre ans. Plusieurs députés de la majorité s’y opposent, estimant « moralement inacceptable de faire financer nos retraites ou nos dépenses de médicaments actuelles par nos petits-enfants », bravo. Qu’une dépense d’investissement pèse sur les générations futures peut se comprendre, mais des dépenses de santé ! Espérons que ces députés l’emporteront et que, par la suite, l’équilibre des comptes sociaux devienne une obligation intangible.

Dette sociale : la majorité pourrait se rebeller, Le Figaro

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

vendredi 24 septembre 2010

L’Allemagne sur la voie de l’Irlande ?

Il ne faudrait pas, il ne faudrait vraiment pas qu’il arrive à l’Allemagne la même mésaventure qu’à l’Irlande. Comme nous l’expliquions dans cette note, l’Irlande a réagit rapidement à la crise de 2008 en restreignant ses dépenses publiques tout en maintenant sa compétitivité. A l’opposé de la Grèce, qui a triché sur ses comptes et qui ne s’est jamais vraiment souciée de lutter contre la fraude et la corruption, l’attitude de l’Irlande semblait assurément s'avérer payante. Malheureusement tous ces efforts sont quasiment réduits à néant par la faute d’une banque (la Anglo Irish Bank) qui nécessite un renflouement massif, de plusieurs dizaines de milliards d’euros ; désormais les marchés doutent de la capacité de Dublin à faire face à ses échéances. Pareillement l’Allemagne a su garder le contrôle de ses finances publiques et elle s’achemine vers l’équilibre, sans avoir recours à des augmentations d’impôts (même pas déguisées comme le rabotage des niches en France). Cependant on apprend qu’Hypo Real Estate étudie le transfert dans une « bad bank » de 200 milliards d’actifs toxiques et qu’elle aurait besoin de 40 milliards d’argent frais. Et Hypo Real n’est pas la seule banque mal en point en Allemagne. Un renflouement massif de plusieurs banques ferait replonger les comptes publics allemands, avec tous les risques que cela comporte en termes de confiance, et de répercussions sur l'Europe. A éviter !

L’UE doute de l’avenir d’Hypo Real, Reuters

Séquence pub : "un livre qui va faire du bruit", La Lettre des placements

Philippe Herlin
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mardi 21 septembre 2010

FESF : toujours plus de dette publique!

Le Fonds européen de stabilisation financière (FESF), dont nous avions parlé dans cette note, vient d’obtenir le AAA de la part des trois agences de notation. Mis en place en mai dernier pour venir en aide à un pays ne pouvant plus faire face à sa dette, il pourra donc emprunter sur les marchés au meilleur prix, jusqu’à 750 milliards d’euros (440 pour les pays européens, 310 pour le FMI). « Le fonds de stabilité n’a pas besoin d’emprunter » s’est aussitôt empressé de déclarer son directeur général, Klaus Regling. Ce fonds, doit-on comprendre, aurait donc surtout une valeur dissuasive, il doit rassurer les investisseurs qui achètent de la dette grecque, portugaise ou irlandaise, en leur garantissant d’être remboursé en cas de défaut de l’un de ces pays. Ca semble séduisant, efficace, mais concrètement – en cas de défaut de l’un de ces pays – on ne fait que reporter le problème, de la dette souveraine vers une dette européenne, soit toujours plus de dette publique ! Une fuite en avant risquée. Ce fonds c’est un peu comme l’arme nucléaire, tant que sa valeur dissuasive reste intacte c’est parfait, mais s’il doit être utilisé, attention aux dégâts !

Le Fonds européen noté AAA, Le Figaro

Le Fonds de stabilité (FESF) n'a pas besoin d'emprunte, Reuters

Rajout : cet article du Monde parle de "la garantie irrévocable et inconditionnelle donnée par les Etats participants"... rien de tel pour enclencher une crise systémique !

Philippe Herlin
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vendredi 17 septembre 2010

Grèce : rien n’est réglé

Comme nous l’indiquions dans cette note, la Grèce n’a pas retrouvé la confiance des marchés. Même si elle lève avec succès des emprunts, ceux-ci sont uniquement à court terme, et pour une raison bien simple : le plan d’aide européen mis en place en mai dernier a une durée de trois ans, les investisseurs sont donc certains d’être remboursés par ce fonds si Athènes fait défaut sur des émissions parvenant à échéance avant 2013. Mais après ? Personne ne s’y risque. Le Wall Street Journal croit savoir que le FMI (qui participe déjà au plan d’aide européen) prendrait le relais après 2013, car la situation s’avère intenable : « Certains analystes n'excluent pas que la menace de faillite ressurgisse en 2013, au terme du prêt de la zone euro et du FMI. Tant qu'ils ne seront pas persuadés que ce pays ne restructurera pas sa dette colossale, une décision qui impliquerait une suspension de paiement, les investisseurs refuseront à Athènes des prêts à long terme, jugés trop risqués. Ce refus oblige la Grèce à multiplier les levées de fonds et les remboursements à court terme, la soumettant à une pression permanente des marchés. »

Grèce : vers une nouvelle aide (WSJ) ? Le Figaro

Philippe Herlin
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mercredi 15 septembre 2010

Budget 2011 : effets d’annonce

Dans une interview au Figaro, Christine Lagarde présente le budget 2011. Le journaliste lui demande comment passer d’un déficit budgétaire de 8 % du PIB à 6 %, la ministre de l’économie lui répond très concrètement : « Passer de 8 % à 6 % nécessitera de réduire de 40 milliards d'euros les déficits publics. Le retour de la croissance apportera mécaniquement 7 milliards. Les mesures de relance, qui figuraient dans le budget 2010 et ne seront plus dans celui de 2011, représentent près de 16 milliards. Quant à la réduction de 5 % des dépenses de fonctionnement et d'intervention annoncée par le président de la République, elle permettra, ajoutée aux autres mesures d'économies, 7 milliards d'économies. Restent 10 milliards à prendre sur les niches. » On a donc affaire à deux hypothèses optimistes (la croissance – prévue à 2 % ! – qui apportera 7 milliards, et 10 milliards à trouver sur les niches, bon courage !), une déclaration de principe qui reste à vérifier (la réduction des dépenses de fonctionnement et d’intervention), et 16 milliards d’économie provoqués par la fin du plan de relance (on fait une dépense exceptionnelle en période de déficit massif, comme ça quand on l’arrête on diminue facilement le déficit de plusieurs milliards… c’est comme le mec qui se promène dans le désert avec une portière de voiture, « oui mais quand j’ai chaud je peux baisser la vitre »). Et justement comment fera le gouvernement en 2012 pour arriver à 3 % de déficit par rapport au PIB, comme il s’y est engagé ? Ces 16 milliards d’économie ne pourront pas être renouvelés, la croissance sera toujours aussi molle, et aller repiquer 10 milliards dans les niches fiscales s’avèrera extrêmement difficile. Mais déjà pour 2011, qui peut croire qu’au 31 décembre ces 40 milliards d’économie auront été effectivement trouvés ? Pour 2012 n’en parlons même pas, nous serons en pleine élection présidentielle, le budget sera un élément secondaire de la campagne électorale. Le plus grave, nous l’avons déjà dit, c’est l’absence de toute réforme structurelle afin de diminuer la dépense publique et de relancer la croissance. Pire, on continue les projets débiles et hors de prix comme les éoliennes en mer qui produiront une électricité huit fois plus chère que les centrales nucléaires !

Christine Lagarde dévoile le budget 2011, Le Figaro

Le gaspillage des éoliennes en mer, Les Echos/Le Cercle

Philippe Herlin
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lundi 13 septembre 2010

L’Irlande dans la tourmente

Nous avions expliqué dans cette note (« L’Irlande n’est pas la Grèce ») que la situation de l’Irlande s’avérait moins grave que celle de la Grèce, notamment parce qu’elle avait entreprit très rapidement après la crise de septembre 2008 un programme de réduction des dépenses publiques. Cependant tous ces efforts risquent d’être remis en cause par les pertes abyssales que connaît la troisième banque du pays, la Anglo Irish Bank (déjà 22,9 milliards d’euros lui ont été versés par Dublin !). Mais il ne faudrait pas pour autant se focaliser uniquement sur l’Irlande dont les vicissitudes doivent nous rappeler que les banques européennes restent encore fragiles et que les séquelles de la crise sont encore présentes dans leurs bilans. Il suffit de voir leur levée de bouclier face aux nouvelles normes de Bâle III, recommandant un renforcement des fonds propres, pour mesurer la fragilité qui est encore la leur. Et ce ne sont pas les stress tests de juillet dernier (qui font l’impasse sur les engagements en dette souveraine) qui vont nous rassurer. Finalement si les gouvernements européens cherchent à diminuer leurs déficits budgétaires aussi rapidement, c’est pour dissiper l’inquiétude des marches bien sûr, mais aussi peut être pour se donner des marges de manœuvre suffisantes en cas de seconde crise bancaire (y compris en Allemagne d’ailleurs).

La zone euro recommence à manquer d'"Eire", Le Monde

Anglo Irish Bank, la banque qui menace l'Irlande, Le Figaro

Philippe Herlin
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vendredi 10 septembre 2010

Un responsable de la BCE met les pieds dans le plat

A rebours des paroles consensuelles des gouvernements européens et des autorités américaines, Lorenzo Bini Smaghi, membre du directoire de la BCE, met les pieds dans le plat et nous avertit du danger des déficits budgétaires et de la dette publique. Il dénonce la création d’une bulle obligataire formées par les relations endogamiques entre les Etats et les banques : « Avec l'accroissement de la dette publique à des niveaux inconfortables, les institutions financières nationales risquent d'être 'encouragées', sinon contraintes, de détenir de la dette souveraine du pays dans leurs portefeuilles ». La faiblesse des rendements obligataires traduisant ce « deal » (l’Etat, par sa banque centrale, prête l’argent quasi gratuitement aux banques, en échange elles achètent sa dette ; tout le monde y gagne mais c’est une bulle qui risque d’éclater un jour). Une crise de la dette serait selon lui imminente, et les conséquences en seraient catastrophiques : « En raison du rôle de prêteur en dernier ressort des pays industrialisés à leur propre système financier, comme cela a été confirmé par cette crise, un problème d'endettement au niveau des Etats paralyserait l'économie dans son ensemble ». Ce serait la ruine (comme je l’explique dans mon livre, séquence pub). La question c’est pourquoi cette déclaration par cette personne (membre du directoire de la BCE on le rappelle) maintenant ? A-t-il d’autres informations sur cette « imminence » ?

Bini Smaghi: des rendements obligataires faibles ne sont pas rassurants, DJ

Une crise de la dette "imminente" (BCE), Le Figaro
(pendant que j’écrivais l’article, le titre de la news a changé… regardez l’url)

Rajouts du 11/9 :
La BCE réfléchit au scénario du pire, Le Figaro

Les Américains croient au scénario de la récession, Le Figaro

Philippe Herlin
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jeudi 9 septembre 2010

La sécu en mal de réformes

Le rapport sur la Sécurité sociale que vient de rendre la Cour des comptes confirme une vérité que les dirigeants politiques refusent d’accepter : le retour de la croissance ne suffira pas à rééquilibrer les comptes (27 milliards de déficit prévu pour 2010). Il en va de même pour les comptes de l’Etat. Et en plus, ce « retour de la croissance » s’avère plus qu’hypothétique vu la faiblesse de ce que l’on n’ose qualifier de reprise… Seule solution : les réformes structurelles. La Cour des comptes pointe les exonérations de charge sociales insuffisamment compensées par l’Etat, soit autant de déficit en plus pour la sécu ; ces exonérations sont sensées aider l’emploi mais nul, au gouvernement comme à la Cour qui s’est penchée sur le problème, ne parvient à en mesurer l’efficacité, et on soupçonne surtout un effet d’aubaine. Les sages de la rue Cambon dénoncent également les progrès de productivité insuffisant des hôpitaux, qui représentent la moitié des dépenses de l’assurance maladie. Mais on n’abordera pas ces dossiers minés avant la présidentielle, encore deux ans de perdu.

Des mesures anti-déficits pour la Sécurité sociale, Le Figaro

> Par ailleurs c’est aujourd’hui, ce 9 septembre, que sort mon livre « France, la faillite ? »

Philippe Herlin
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lundi 6 septembre 2010

Prémonitions ?

La banque d’affaires Lazard aurait-elle quelques prémonitions ? Elle vient en effet d’embaucher Pierre Cailleteau (dont nous avions parlé dans cette note), le responsable du risque souverain de Moody’s, c’est à dire celui qui, au sein de la première agence de notation au monde, s’occupait de noter les Etats. Dont la France bien sûr. Lazard est en train de se faire une place sur ce créneau, c’est actuellement la banque conseil de la Grèce pour sa dette. Elle « renforce son activité de conseil aux gouvernements » (nous dit une dépêche AFP), autrement dit elle prévoit des difficultés croissantes pour les pays endettés…

Pierre Cailleteau rejoint Lazard, L’Agefi

Philippe Herlin
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jeudi 2 septembre 2010

LIVRE : France, la faillite ?

En exclusivité pour les lecteurs de ce blog, je me permets de vous présenter le livre que je publie le 9 septembre chez Eyrolles : France, la faillite ? Ce blog sert de base au livre mais, vous le constaterez, la plupart des informations et des analyses sont inédites.

France, la faillite ? sort le 9 septembre, vous pouvez dès maintenant le réserver auprès de votre libraire ou le commander sur Internet. Bien évidemment, tous vos commentaires sont les bienvenus !

Plan détaillé, dédicace, etc :
http://www.philippeherlin.com/france_la_faillite.htm

Philippe Herlin
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mercredi 1 septembre 2010

La dette des HLM : 90 milliards !

Un rapport de la Mission interministérielle d'inspection du logement social nous apprend que des organismes HLM ont abusé d’emprunts toxiques, pour un montant total de 8 milliards d’euros. Les bailleurs sociaux veulent attaquer en justice les banques qui leur ont proposé de tels produits, mais s’il y a de la cupidité chez banques, il existe aussi une bonne dose d’incompétence chez ces responsables gérant des fonds aussi importants… On apprend au passage que les organismes HLM sont globalement endettés à hauteur de 90 milliards d’euros ! Ce chiffre est-il comptabilisé dans la dette publique de la France (1535 milliards au 31 mars 2010, « au sens de Maastricht », la norme européenne) ? A notre connaissance non. Voici donc de la dette publique masquée (comme les hôpitaux publics, endettés à hauteur de 20 milliards), c'est-à-dire de la vraie dette publique (l’Etat est le débiteur en dernier ressort) mais, en jouant habilement de la réglementation, non décomptée. C'est ce qu’on pourrait appeler de la « finance publique toxique »…

Des HLM empoisonnés par les produits financiers toxiques, Le Figaro

Philippe Herlin
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