jeudi 30 avril 2009

Si on parlait économies budgétaires !

L’explosion de la dette dans les pays occidentaux oblige dès maintenant à se poser la question du contrôle des déficits publics. On a déjà parlé, dans cette note, d’Obama qui demande à ses ministres de faire des économies, certes symboliques, mais le geste compte néanmoins. L’Allemagne, nous apprend Jacques Delpla dans Les Echos, a décidé de limiter à partir de 2011 son déficit budgétaire à 0,35 % du PIB, «hors circonstances exceptionnelles», les deux grands partis (CDU et SPD) sont tombés d’accord. On rêve. Où en est la France dans ce domaine ? Il serait temps de commencer à y penser car si le marché de la dette souveraine se restreint, comme on peut le penser, les fonds iront vers les plus vertueux.

La révolution budgétaire à venir, Jacques Delpla, Les Echos

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mardi 28 avril 2009

Il n’y a plus de liquidités !

Rappelez vous, avant la crise on nous expliquait que le monde regorgeait de liquidités, qu’il n’y avait aucune crainte à avoir là-dessus. On a vu à quelle vitesse elle s’est évanouie après la faillite de Lehman Brothers. Désormais c’est le contraire qui risque d’arriver, un manque criant au moment où les Etats empruntent à tout va sur les marchés. C’est ce que pense le gérant d’un fonds cité par l’excellent Ambrose Evans-Pritchard du Telegraph : «Le monde est à court de capitaux. Nous ne pouvons pas tenir pour acquis que les marchés obligataires mondiaux se révéleront d’une profondeur suffisante pour financer les près de 6000 milliards de dollars qui sont requis par le paquet fiscal Obama, le renflouement des banques américaines et européennes, et les déficits qui enflent presque partout.»

Quels Etats seront mis en défaut de paiement ? La zone euro résistera-t-elle ? Voici les questions qu’il faut se poser. Le gérant de fonds poursuit : «Le nœud du problème, ce ne sont pas les subprimes, ou les autres prêts hypothécaires, ou telle ou telle banque. Les gouvernements à travers le monde ont permis à leurs systèmes bancaires de grandir sans contrôle, et dans certains cas de grandir jusqu’à représenter un passif insoutenable pour le pays hôte.» La France est dans ce cas et d’ailleurs, selon le site Slate.fr, L'Elysée envisage de nationaliser les banques…

Capitaux : il n’y en aura pas pour tout le monde, par Ambrose Evans-Pritchard

L'Elysée envisage de nationaliser les banques, Dominique Mariette

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

samedi 25 avril 2009

Inquiétudes au RU et en Allemagne

Ca s’aggrave au Royaume-Uni et en Allemagne. Outre-Manche les déficits publics explosent et le pays devra emprunter l’équivalent de 246 milliards d’euros sur l’année 2009 (contre «seulement» 155 pour la France). Le marché absorbera-t-il tous ces emprunts ? Si la confiance se perdait, le Royaume-Uni devrait faire face à un problème de financement qui serait redoublé d’une perte de valeur de sa monnaie, il pourrait s’en tirer en faisant tourner la planche à billets (la Banque d’Angleterre achète les emprunts du Trésor) mais avec un sérieux risque d’inflation. Outre-Rhin c’est l’autorité de tutelle du secteur financier qui annonce que les banques allemandes totalisent 816 milliards d’euros d’actifs toxiques ! Un montant énorme qui met en jeu la crédibilité du système bancaire allemand.

En France, semble-t-il, nous sommes en dessous du déficit anglais et nos banques ont des bilans moins dégradés que leurs consoeurs allemandes. Piètre consolation, car la crise n’est pas terminée.

Emprunts d'Etat : le Royaume-Uni frôle l'indigestion, Le Monde

Les banques allemandes totaliseraient 816 milliards d'euros d'actifs à risque, Les Echos

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mercredi 22 avril 2009

Bravo M. Apathie !

Ils ne sont pas si nombreux les journalistes qui dénoncent régulièrement le danger que représente l’endettement public. Jean-Michel Apathie en fait partie et son dernier article rappelle que la crise financière et économique rend ce problème plus brûlant encore. Il délivre un salutaire avertissement :

«Si les marchés financiers ne perçoivent pas clairement quelles politiques les Etats mettront en oeuvre pour éviter d’accumuler une montagne de dettes qui apparaîtra un jour insurmontable, ils risquent, ces marchés, de couper le robinet du financement des déficits. Et c’est là, avec une rapidité et une violence dont nous n’avons pas idée, que tout peut se dérégler.»

Et cette politique ne pourra pas être, comme nous l’avons indiqué dans cette note, une hausse des impôts, la solution de facilité ! Si les gouvernements sont très prolixes pour annoncer des plans de relance, on attend les plans d’économie sur le train de vie de l’Etat. Barak Obama vient de commencer, il «vient d'ordonner à son gouvernement de trouver 100 millions de dollars d'économies dans son budget au cours des 90 prochains jours, en guise d'exemple de rigueur financière». C'est peu mais c'est un début, bravo. Qu’en est-il en France ? (non c’est de l’humour).

L’article de Jean-Michel Apathie sur la dette

Obama veut que ses ministres fassent 100 millions d'économies (e24)

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

vendredi 17 avril 2009

Les Seychelles se moquent du monde !

C’est une simple dépêche qui nous l’apprend, une information qui ne sera pas reprise dans les médias et qui disparaîtra aussitôt : l’archipel des Seychelles a vu sa dette publique annulée à hauteur de 45 %. Les Seychelles, c'est-à-dire un paradis fiscal, recensé comme tel par l’OCDE ! De qui se moque-t-on ? Le G20 annonce avec trompettes et roulements de tambour qu’il faut lutter sans merci contre les paradis fiscaux, et on efface la moitié de la dette publique de l’un d’entre eux ! Si ce pays a des problèmes pour boucler ses fins de mois qu’il relève ses impôts, mais on ne voit pas pourquoi des pays ayant un régime fiscal «normal», (plus ou moins) équitable et transparent devraient abandonner leurs créances envers une place offshore ! C’est trop facile de jouer sur les deux tableaux, d’attirer les sociétés et les trafics plus ou moins recommandables et de faire l’aumône auprès des «pays riches». Résultat, si la France est engagée envers ce pays, sa dette va mécaniquement augmenter suite à ce cadeau injustifié !

Seychelles: annulation de 45% de la dette

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mercredi 15 avril 2009

Les députés s’inquiètent de la dette…

Les députés de la majorité viennent de lancer le site ladepensepublique.fr afin de recueillir l’avis des internautes pour réduire le déficit et l’endettement de l’Etat. Même si en réalité ils savent déjà ce qu’il faut faire (nombreuses expériences réussies à l’étranger, rapports de la Cour des comptes, études de Contribuables associés et de l’IFRAP, etc), l’attention est louable, touchante presque. Les députés s’inquiètent de la dette, tant mieux.

Les internautes font preuve de bon sens, parmi les «propositions les mieux notées», on remarquera avec satisfaction : Présenter toutes les dépenses publiques sur Internet, Réformer le mille-feuille administratif, S'inspirer des autres pays, Des auditeurs indépendants pour rationaliser et réduire la dépense publique. Très bien. On notera également que nombre de suggestions concernent directement les élus : Supprimer le détachement politique et syndical, Revoir le statut parlementaire, Supprimer les comités Théodule, Mieux contrôler toutes les dépenses liées aux logements de fonction, Encadrer les dépenses de communication et de réception des collectivités locales, etc. Bravo. On a envie de dire à ces députés : chiche ;-)

La dépense publique
http://www.ladepensepublique.fr/

Philippe Herlin
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samedi 11 avril 2009

La BCE va-t-elle racheter des obligations ?

Nous avions indiqué dans cette note que la BCE s’interdisait d’acheter des obligations (de grandes entreprises et d’Etat), comme le faisaient la Fed la Banque d’Angleterre. Mais devant la persistance de la crise des marchés financiers, Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France, a annoncé que cette option est à l’étude. Voici un sacré changement d’orientation ! On se doute que la France y est favorable (y compris et peut être surtout pour les emprunts d’Etat) et que l’Allemagne freine des quatre fers, ça va négocier durement…

Quoi qu’il en soit, cette politique comporte de nombreux risques, notamment quant au bilan des banques centrales, comme nous l’avions indiqué dans cette note. Les avantages semblent peu évidents tandis que les risques (perte de crédibilité de la BCE suite à un bilan dégradé, inflation, perte de valeur de l’euro) sont lourds de conséquence. C’est le meilleur moyen d’entrer dans une bulle obligataire, nous serons donc très circonspects. A suivre.

La BCE "étudie" des mesures quantitatives (e24)

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mardi 7 avril 2009

La dette et l’impôt

Intéressant article de Daniel Cohen dans Le Monde daté du 6 avril, intitulé «Nouvelles inquiétudes sur les risques d'un krach obligataire». Constatant l’explosion des déficits publics, et déplorant que le G20 soit resté muet sur le sujet, l’auteur montre que l’Europe est dans une «situation atypique» car, contrairement à la Fed et à la Banque d’Angleterre, la BCE ne peut pas acheter d’emprunts d’Etats européens (et ainsi faire tourner la planche à billets), ce qui expose les pays fragiles comme la Grèce à un risque de défaut (nous l’avions signalé dans cette note).

Si les risques de faillite d’Etats (en Europe) ou d’inflation (pour les US et le Royaume-Uni) sont non négligeables, Daniel Cohen considère cependant que l’hypothèse la plus probable pour contenir et résorber l’endettement sera une hausse des impôts. Mais faisons ici une remarque, si une hausse substantielle des impôts est tout à fait possible aux Etats-Unis ou au Japon, elle est impossible en France car nous sommes déjà au maximum ! La taux de prélèvements obligatoires est ainsi de 27,3 % du PIB aux Etats-Unis, 27,4 au Japon, 34,8 en Allemagne, 36,5 au Royaume-Uni et 44,1 % en France (chiffres 2005). Les américains ou les japonais peuvent se permettre pendant quelques années une hausse de leurs impôts de 3 à 5 % sans remettre en cause leurs compétitivité. Une telle hausse en France, où nos entreprises perdent déjà du terrain à l’international (cf la dégradation de notre commerce extérieur) provoquerait des délocalisations et des faillites, et finalement une stagnation ou une baisse des recettes fiscales. Nous sommes en haut de la courbe où une hausse des impôts ne provoque pratiquement pas d’augmentation des recettes fiscales. Nous ne pourrons pas utiliser ce moyen. Il reste une solution mais c’est un gros mot : réformes.

Nouvelles inquiétudes sur les risques d'un krach obligataire, Daniel Cohen, Le Monde 6/4/2009

Les prélèvements obligatoires (wikipedia)

Philippe Herlin
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lundi 6 avril 2009

Un bilan du G20

Sans vouloir faire un bilan d’ensemble, je souhaite insister sur deux points :

- Même si beaucoup de décisions importantes ont été prises, le principal problème n’a pas été traité de front, à savoir les actifs toxiques des banques. Une des causes de ce problème, et par là même une des façons de le résoudre, réside dans l’obstination à maintenir, même en l’assouplissant, l’obligation de Fair Value pour les comptes des sociétés, je m’en suis déjà expliqué (cf les textes ci-dessous).

- Concernant spécifiquement l’objet de ce blog, l’une des annonces essentielles est le renforcement des moyens du FMI, ce qui est une bonne chose. En effet, le FMI joue par rapport aux Etats le rôle que les Etats jouent par rapport à leurs systèmes bancaires, la garantie de solvabilité, le dernier recours. Ceci dit, si on renforce les moyens du FMI c’est que l’on craint, sinon un krach obligataire, du moins de réelles difficultés sur ce segment… Et précisons justement que la plus grande partie de cette augmentation des moyens du FMI viendra… d’emprunts que l’institution devra réaliser («Le solde (500 milliards) viendra des nouveaux accords généraux d'emprunt ou d'émission du FMI sur le marché» Les Echos du 3 avril 2009). Le FMI va venir sur le créneau de plus en plus embouteillé de la dette souveraine, il risque même d’en accélérer la thrombose, mais ne faisons pas de mauvais esprit, l’intention est louable.

Le rôle de la Fair Value dans la crise

Comment sortir de la crise… par le marché !

Le FMI acquiert un rôle central et gagne des moyens considérables, Les Echos 3/4/2009

Philippe Herlin
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vendredi 3 avril 2009

La discrète CADES

Fruit de l’étonnante inventivité fiscale de nos hauts fonctionnaires, la CADES (Caisse d’amortissement de la dette sociale) réalise le prodige de faire peser les dépenses de santé des Français sur les générations futures. En effet, cette structure a été crée pour reprendre la dette de la Sécurité sociale en contrepartie d’un impôt spécifique, la CRDS (0,5 % sur la quasi-totalité des revenus: travail, retraite, patrimoine) ; et quand la dette aura été apurée, cet impôt disparaîtra. C’était présenté comme ça… Lors de sa création en 1996, la CADES a repris la dette de la sécu (21 milliards d’euros, 137 milliards de francs) et, avec les revenus de la CRDS elle aurait du s’éteindre en janvier 2009… On a du louper quelque chose ! Bien sûr, car aucune réforme sérieuse n’a été entreprise pour réformer la Sécurité sociale et les déficits ont continué de s’accumuler, que l’Etat a alors reversés dans la CADES. Et telle l’Arlésienne, la date d’extinction de la CADES (et donc la fin de la CRDS) est progressivement repoussée. Aux dernières nouvelles c’est pour 2021, mais comme les déficits de la sécu continuent de s’accumuler, il ne faut plus espérer voir disparaître un jour la CRDS !

On apprend accessoirement dans un «chat» avec son président que la CADES ne s’endette pas seulement en euros mais aussi en devises (dollar, yen, franc suisse) !

Pour situer les choses, la «dette de la France» comprend la dette de l’Etat (un peu plus de 1.000 milliards, gérée par l’AFT), la dette des collectivités locales (200 milliards, gérée par les collectivités) et la dette de la Sécurité sociale (plus de 100 milliards, gérée par la CADES). Et on ne compte pas les engagements de l’Etat pour les retraites des fonctionnaires. Il ne faut donc pas manquer de s’intéresser à la discrète CADES…

Le «chat» avec le président de la CADES

Le site de la CADES

Philippe Herlin
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mercredi 1 avril 2009

T’as pas 155 milliards ?

155 milliards d’euros, voici ce que l’Etat devra emprunter sur le marché en 2009 pour financer sa dette. C’est plus que le déficit du budget prévu pour 2009 (104 milliards) ! Bien sûr, car il faut aussi payer les intérêts et les remboursements des emprunts arrivant à échéance. C’est ce qu’on appelle le «service de la dette» ou «engagements financiers de l’Etat», qui est devenu le deuxième poste de dépense de l’Etat, derrière l’éducation et devant la défense.

Donc l’AFT (Agence France Trésor), qui gère la dette de l’Etat, doit tous les ans lever des fonds pour :
1) assurer le service de la dette (les plus de 1.200 milliards d’euros dont il faut payer les intérêts et rembourser les tranches d’emprunts qui arrivent à échéance), soit 46 milliards dans le budget 2009 (avant la loi de finance rectificative, donc le chiffre réel est un peu plus élevé).
2) financer le déficit, soit 104 milliards dans la loi de finance rectificative du budget 2009

Soit un total de 150 milliards d’euros, l’AFT en levant 155 pour avoir un peu de marge (car le déficit sera certainement supérieur au 104 milliards budgétés). Le marché pourra-t-il absorber cette somme ? «T’as pas 155 milliards ?», et ce n’est pas un poisson d’avril !


Le bulletin mensuel de mars de l’AFT (cf page 2) :
http://www.aft.gouv.fr/IMG/pdf/226_BMT_FR__Mars_09_-2.pdf

Les dépenses de l’Etat
http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/finances-publiques/ressources-depenses-etat/depenses/quelles-sont-depenses-etat-par-mission.html#

Et en bonus, le texte que je fais paraître aujourd'hui sur la crise et le G20 :
Comment sortir de la crise… par le marché !
http://www.acdefi.com/index.php?pid=697

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr