mardi 17 février 2009

Une sortie de la zone euro envisagée dès 2005…

Il ne faut pas tout mettre sur le dos de la crise financière actuelle, la dégradation continue de la situation économique de la France (dette, déficits publics et commerciaux) remonte à longtemps, et bien avant la faillite de Lehman Brothers certains s’interrogeait sur le maintien de la France dans la zone euro.

Nous l’avons vu dans une note précédente, Standard & Poor’s alertait en 2005 sur le fait que « La France est en train de glisser en bas de la catégorie AAA ». En cette même année, l’un des meilleurs économistes de la place parisienne, Patrick Artus, publiait (chez Ixis, futur Natixis) une note intitulée : « La France et surtout l’Italie devront-elles sortir de la zone euro ? ».

Constatant les pertes de parts de marché à l’exportation, la faiblesse des gains de productivité, la persistance des déficits publics, il avertissait : « On peut donc craindre à 5 ans, à 10 ans, que la France et l’Italie ne soient dans une situation très difficile : pertes cumulées considérables de parts de marché, croissance tendancielle très faible, taux d’endettement public insupportable » (page 5)

D’autant que la principale économie européenne faisait, elle, les efforts nécessaires pour améliorer sa productivité : « La situation de la France et de l’Italie est de plus fortement aggravée par la stratégie économique suivie par l’Allemagne. Cette dernière mène une politique non coopérative de baisse du coût salarial unitaire, pour regagner des parts de marché surtout vis-à-vis des autres pays de la zone qui ne suivent pas la même stratégie » (page 7).

Dès lors, selon Patrick Artus, la conclusion s’impose :
« La France et l’Italie sont alors placées devant le dilemme suivant:
- soit refuser d’adopter la stratégie de réduction des coûts choisie par l’Allemagne, et continuer à perdre de plus en plus de parts de marché ;
- soit adopter la même stratégie que l’Allemagne, et accepter plusieurs années de pertes d’emplois et de revenus comme l’Allemagne.
La seule manière de sortir de cette situation est alors de sortir de l’euro et de dévaluer. » (page 8)

Avec le recul on constate malheureusement que la France a choisi de ne pas choisir et continue de voir s’accroître son déficit commercial et sa dette… et que cette évolution est accélérée par la crise financière actuelle.

Nous serons, pour notre part, plus circonspect sur la sortie de l’euro comme solution à nos maux actuels. Premièrement, la dette étant libellée en euro, repasser au Franc et dévaluer ne fera qu’accroître son poids (ce point n’est pas explicité dans la note qui semble considérer que l’on rembourserait alors la dette en Francs…). Deuxièmement, une dévaluation améliore temporairement la compétitivité, mais une amélioration durable ne peut que reposer sur une baisse des prélèvements obligatoires, une hausse de l’investissement et de la recherche, et un minimum de politique industrielle. Mais il est clair que la situation actuelle n’est pas tenable.

Cet avertissement datant de 2005 reprend un intérêt certain à la lumière des rumeurs actuelles d’éclatement de la zone euro…

Vous pouvez lire la note de Patrick Artus ici :
http://www.philippeherlin.com/blogdocs/Artus2005.pdf

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr