lundi 1 septembre 2014

Pour une Renaissance économique française (mon intervention au Campus du Touquet)

Voici le texte de mon intervention au Campus du Touquet le samedi 29 août, le grand rendez-vous de rentrée de l’UMP, lors de l’atelier intitulé « Les jeunes entrepreneurs, l'avenir de l'économie française ? ».


Près d’un jeune sur trois a l’intention de quitter la France, pour créer son entreprise ou travailler à l’étranger, selon différentes enquêtes, et plusieurs dizaines de milliers le font effectivement tous les ans, même s’il n’existe pas de statistiques fiables.

Partir travailler à l’étranger n’est évidemment pas condamnable, bien au contraire, une expérience professionnelle internationale s’avère toujours profitable, et souvent nécessaire. Mais ce mouvement naturel se double d’une véritable défiance. Posons la question : les entrepreneurs ont-ils encore leur place en France ?

Cette défiance ne touche d’ailleurs pas que les entrepreneurs, mais aussi les grandes entreprises. Total a transféré sa trésorerie à Londres, le DG de Sanofi et son comité exécutif sont à Boston, après sa fusion avec Holcim, Lafarge installera son siège social à Zurich.

Cette perte de substance économique se comprend : le pouvoir fait tout pour décourager la création de richesse ! La taxe à 75% étant la cerise sur le gâteau indigeste que nous a servi le gouvernement. Mais pour se défausser, ce même pouvoir préfère sur taper sur les « exilés fiscaux ». C’est toujours la stratégie du bouc émissaire.

Il faut le dire : le capitalisme sans capital, ça ne marche pas ! Tout est fait pour décourager la création et l’accumulation de richesse, résultat les entrepreneurs et les entreprises s’en vont, ou se font racheter comme Alstom.

Comme l’explique l’économiste Hernando de Soto dans son livre « Le mystère du capital » : « le capital n’est pas le stock de biens accumulés, mais le potentiel de production nouvelle qu’il contient ». Il faut avoir une vision dynamique, le capital est d’abord un potentiel, et vouloir opposer le capital au travail constitue une pure aberration.

Alors que faut-il faire ?

Il ne faut pas lancer un « plan d’aide aux entrepreneurs », ce serait encore une vision étatique.

La crise de l’entrepreneuriat en France révèle des problèmes que chacun connaît bien : cette crise provient 1) d’un niveau bien trop élevé des taxes, des charges et des impôts, 2) d’un excès de bureaucratie, et 3) d’un droit du travail trop rigide.

C’est la crise de l’économie française dans sa globalité. Il n’y a pas qu’une crise de l’entreprenariat, il y a une crise de « l’entreprise France », qui s’enfonce dans la pauvreté et le chômage.

La réponse, selon moi, consiste à s’attaquer à la racine du problème, c'est-à-dire la dépense publique. L’Institut Montaigne a calculé que la dépense publique en France (Etat, collectivités locales, sécu) atteint 1.151 milliards d’euros, soit 57% du PIB ! Ce chiffre n’a fait qu’augmenter depuis 40 ans, aucun gouvernement n’a su le faire refluer.

Le temps des ajustements est terminé, il faut changer de paradigme. Il faut reprendre à notre compte la formule de Ronald Reagan : « le gouvernement n'est pas la solution à nos problèmes ; le gouvernement est le problème ».

L’Etat ne doit pas intervenir partout et tout le temps, notamment pas dans le champ économique.

A ce propos, ouvrons une parenthèse pour dénoncer une perversion du langage.

L’Etat intervient, par exemple, dans le domaine du logement en expliquant que le « marché » fonctionne mal (pas assez de logements, prix trop élevés). En réalité c’est l’inverse : c’est parce que l’Etat intervient trop, que le marché du logement est déréglé et ne permet plus une bonne adéquation entre l’offre et de la demande ! (en cause la loi SRU avec les 20% de logements sociaux, il faudrait plutôt vendre les HLM ; un plan d’occupation des sols malthusien, restrictif ; des droits du locataire déséquilibrés par rapport au propriétaire, résultat on estime qu’il existe un million de logements vides, mais les gauchistes réclament la « réquisition » ; la loi Duflot n’étant que le dernier texte interventionniste en date).

Autre exemple avec la « transition énergétique » qui n’est qu’un prétexte fumeux pour accumuler des lois, des taxes et des dépenses. Sur des a priori plus que douteux, l’Etat décide de développer les éoliennes terrestres (qui défigurent nos paysages) et en mer (qui coûtent une fortune, plus de 10 milliards d’euros). La conséquence de cette politique folle c’est vous qui la payez sur votre facture, avec la « CSPE » (Contribution au service public de l’électricité), qui sert à payer la différence – énorme et croissante – entre le prix de marché de l’électricité et le prix subventionné des énergies éoliennes et solaires.

Dernier exemple avec la volonté du pouvoir actuel d’étatiser le monde des startups : il commence par relever fortement les taxes sur les plus values de cession (c’est l’affaire des « Pigeons »), puis quand, naturellement, les flux de capitaux vers les nouvelles d’entreprises se tarissent, l’Etat apparaît avec sa solution : la BPI, dont les dirigeants sont nommés par le pouvoir.

Voilà le comportement véritablement pervers des étatistes et des interventionnistes : dérégler le marché par des lois, puis intervenir encore plus au nom des « échecs » supposés du marché.

C’est pour cela aussi que quand j’entends que le pouvoir actuel ferait un « tournant libéral », ou du « social libéralisme », je dis aux médias et aux commentateurs : arrêtez de vous moquez des Français ! Il n’y a absolument rien de libéral dans l’action du gouvernement socialiste ! Au contraire, l’étatisation continue de progresser (on l’a vu récemment avec le logement ou les taxis). Ce ne sont pas de petits avantages fiscaux comme le CICE qui changent la donne : le bateau coule, mais on vous donne une tasse plus grande pour écoper, merci !

Je referme la parenthèse.

Il est donc nécessaire de ramener l’Etat à ses fonctions régaliennes (qu’il gère d’ailleurs très mal aujourd’hui, comme on le voit avec la sécurité ou l’état de notre armée). De cette façon nous pourrons vraiment réduire les dépenses publiques, et enclencher une baisse massive des impôts et des taxes.

Pour reprendre la formule de Frédéric Bastiat, le grand économiste français du XIXe : « L'État, c'est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s'efforce de vivre aux dépens de tout le monde. »

Nous devons sortir de cette logique, de cette dépendance.

Le statut d’autoentrepreneur, qui fait partie des grandes réussites du mandat de Nicolas Sarkozy, démontre qu’une imposition limitée (de l’ordre d’un peu plus de 20% du CA) et un fonctionnement souple (pas de revenu, pas d’impôt à payer) génère de l’activité et crée de l’emploi. Bien sûr, ce statut favorise et récompense la prise de risque !

Ce statut doit devenir une source d’inspiration pour les réformes économiques à venir. Au-delà de la baisse des prélèvements publics, notre système juridique et fiscal doit encourager la prise de risque. Un entrepreneur réussit rarement du premier coup, n’entravons pas sa marche vers le succès.

Mais un changement de paradigme est également nécessaire dans la société, plus précisément dans la perception du marché du travail. Selon différents sondages, les trois quarts des jeunes rêvent de devenir fonctionnaires… Le service de l’Etat constitue certes une noble mission, mais il ne faudrait pas que des éléments secondaires entrent en ligne de compte, comme par exemple l’emploi à vie.

Pour cette raison, je considère qu’il faut abolir le statut de la fonction publique (au moins pour les nouveaux entrants, ou pour tous les fonctionnaires d’un coup si possible…), les recrutements se faisant dans la cadre du droit du travail commun (seules les missions régaliennes en seraient exemptées).

Ce serait envoyer un signal fort : « vous cherchez un poste de planqué ? Désolé nous n’avons plus ça au catalogue ! »

« Ca créera plus de précarité ! » hurlera la gauche. C’est faux, la précarité c’est aujourd’hui avec 3 millions et demi de chômeurs, et même 5 millions si l’on inclut les demandeurs d’emploi en « activité réduite ».

Le taux de chômage des jeunes approche les 25%, la solution ce n’est pas la fonction publique, ni les pseudos « emplois d’avenir ».

Le poids de la sphère publique en France finit par écraser l’esprit d’initiative, voilà le problème.

Avec une dette publique de 2.000 milliards d’euros, des déficits qui ne se résorbent pas, des faillites d’entreprises qui battent des records, un chômage, on l’a dit, qui touche 5 millions de nos compatriotes, il est urgent de se remettre en cause et d’agir.

Tout le débat actuel sur « l’austérité » qui freinerait la croissance n’est qu’une vaste fumisterie. Cette thèse est défendue, je le sais, par la plupart des économistes, enfin, ceux que l’on voit dans les médias et qui sont pour la plupart des keynésiens et des étatistes, mais pas par les libéraux, que l’on entend beaucoup moins.

Il n’y a aucune austérité pour l’Etat, dont les dépenses n’ont jamais diminué sur les 40 dernières années. Au contraire, le déficit de ses comptes est récurrent, soi-disant pour soutenir la demande ; on voit le résultat : la croissance zéro !

L’austérité c’est pour les ménages et les entreprises qui supportent de plus en plus de taxes et d’impôts, pour financer le train de vie d’un Etat et des collectivités locales qui ne font aucun effort de productivité. Il faut que cela cesse.

Nous n’avons plus beaucoup de temps. Il faut changer de paradigme et encourager l’initiative et la prise de risque. Et ainsi les jeunes entrepreneurs deviendront le fer de lance de la « Renaissance économique française ».

C’est ce à quoi nous devons nous atteler pour 2017.

Je vous remercie.

Philippe Herlin