mercredi 14 novembre 2012

A quand un WIR français ?

La ville de Nantes va lancer une monnaie complémentaire (Le Figaro), c'est à dire une monnaie locale que chacun - particulier ou commerçant - pourra utiliser à sa guise. Les commerces acceptant cette monnaie offriront des réductions, ce qui permet de fidéliser la clientèle, et globalement l'argent dépensé profite plus à l'économie locale. Une très bonne idée, lancée au début du XXe siècle par Silvio Gesell, et qui rejoint la notion de mise en concurrence des monnaies développée par Hayek dans Denationalization of money (1976), j'en parle dans les deux derniers chapitres de Repenser l'économie.

L'homme à l'initiative de ce projet est Jean-Marc Ayrault, l'ancien maire de la ville. Il a défendu à plusieurs reprises dans la presse le WIR, une monnaie interentreprises suisse, la plus ancienne monnaie complémentaire du monde (1934), dont l'usage permet des facilités de paiement et de crédit (Wikipédia, comptes détaillés). Rendons lui hommage, très peu de responsables politiques en France connaissent cet outil. Le succès est incontestable : une PME suisse sur cinq l'utilise (en complément du franc suisse bien sûr, pas exclusivement). Imagine-t-on cela à l'échelle de la France ? Ce serait plus intelligent que la BPI, qui va coûter cher et ne pourra satisfaire qu'un nombre restreint de PME, et sera sous influence clientéliste. Et la mise en place d’une monnaie complémentaire ne coûte pas un euro d’argent public.

Maintenant Jean-Marc Ayrault est Premier ministre, que n'attend-il pour lancer un WIR français ? Mais, c'est vrai, les banques n'aiment pas les monnaies complémentaires, c'est en effet autant d'activité (et de commissions) perdues pour elles, pour des transactions qui s'effectuent en dehors de leur circuit. En 1934, les banques suisses se sont violemment opposées au WIR, sans succès, mais ailleurs en Europe, à la même époque, la plupart des projets de ce type ont rapidement disparu sous la pression du lobby bancaire. On imagine que les banques françaises ont du voir cette idée de WIR d'un mauvais œil et faire capoter l'affaire. Vérité à Nantes, erreur à Paris ? Allons, Monsieur le Premier ministre, un peu de courage !

Philippe Herlin