vendredi 12 octobre 2012

Espagne, Italie : un bank run au ralenti

Il n’y a pas que les Grecs qui transfèrent leurs économies à l’étranger, ce phénomène touche également l’Espagne et l’Italie, et c’est évidemment beaucoup plus grave. Le raisonnement des épargnants est simple : si la zone euro explose, ou si mon pays en sort, je me retrouve sur mon compte en banque avec des drachmes/lires/pesetas qui ne vaudront pas grand-chose, alors que si je transfère mon épargne en Allemagne (ou au Luxembourg, Pays-Bas), j’aurais des euros (ou des Deutsche Marks si l’Allemagne revient à sa monnaie). Le choix est vite fait ! Le mouvement atteint un niveau inquiétant, et le FMI s’en inquiète : de juin 2011 à juin 2012, 296 milliards d’euros ont quitté l’Espagne, 235 milliards l’Italie (Le Monde). Tout cet argent, que les particuliers et les entreprises sortent de leurs comptes, manque aux banques du pays qui voient leurs bilans se dégrader, leur besoin de liquidité croître, ce qui accélère la crise... On assiste ainsi à une dislocation interne de la zone euro, sur laquelle les Etats ne peuvent pas agir, à moins de rétablir le contrôle des changes ! Pour la France rien à signaler pour l’instant, mais le mouvement de fuite devant la fiscalité, qui est réel et date de plusieurs années, prendrait une ampleur incomparable si la confiance dans le système bancaire venait à flancher…

Autrement, dans la série « faisons du Ponzi et Madoff est un amateur », le ministre des finances Pierre Moscovici fait un chèque de 31,4 milliards d’euros au FMI (Le Figaro). La France prête au FMI pour que le FMI prête aux pays européens en difficulté. Pourquoi passer par le FMI et non pas par le MES qui a été créé pour cela ? Parce ça ne coûte rien à l’Etat, même pas sous forme de garantie. C’est en effet la Banque de France qui paye, sans décaisser d’ailleurs puisque concrètement elle se prive d’une partie de ses devises en échange d’une créance sur le FMI (comme expliqué ici). Mais au final on prête à des acteurs économiques qui ne sont pas solvables (Grèce, Espagne), comme pour les subprimes.

Philippe Herlin